En pénétrant un jour glacé de février 2015 dans l’atelier de Robin Touchard, la première œuvre visible était un ensemble d’objets transparents posés au sol dans une sorte de conglomérat de verres, de carafes ou de vitres aussi chaotique qu’intrigant. On comprend vite qu’il s’agit en fait d’une surface fragmentée qui sert à la fois d’objet et d’écran de projection (Le bruit des pyramides, 2015). L’installation se compose de plusieurs sources de lumière qui viennent englober et réfracter l’ensemble des éléments, provoquant de multiples reflets sur des perspectives changeantes. Tout est dans tout. Il en est de même dans la série des sculptures Résurgences # 1, 2 et 3 (2010, 2011 et 2013). Trois monolithes en polystyrène ou en bois se délitent sous l’effet de l’acide et de la glycéro. Des coulures tombent sur du plâtre qui lui-même s’étend sur de la bâche qui couvre le sol. Dans la version 3, de la lumière intégrée à la forme accentue l’effet de laboratoire in vivo. L’entropie est à son comble dans la vidéo Tumulte, 2014, dans laquelle tous les objets qui composent son atelier – situé alors dans des anciens locaux administratifs – se mettent à voler en éclats, à tournoyer dans tous les sens, tel un ballet autodestructeur. Chez cet artiste, les matériaux deviennent matière, toujours dans un souci du vivant, selon des processus de transformation qui testent les limites de l’expérience, les marges de la transition où fusionnent, comme il le suggère lui-même, « des formes organiques et artificielles ».

Eric Mangion